Claude NICOLET

Le site de

Marianne2Ma tribune parue ce jour 01 décembre sur le site de Marianne2.fr  

Devant un système qui a contribué à mettre « l'Europe, son industrie, ses salariés, ouvriers, ingénieurs, cadres, fonctionnaires, commerçants, ses entreprises, à la merci de la finance la plus brutale, la plus cynique », Claude Nicolet ne peut se défaire d'un sentiment d'écoeurement. Le secrétaire national du Mouvement républicain et citoyen (MRC), présidé par Jean-Pierre Chevènement, publie cette tribune comme une alerte : « Il ne faut hélas se faire aucune illusion : le pire est à venir. »

Fin rapide de l'euro, récession générale de l'économie européenne, explosion du chômage, de la précarité et de la misère en Europe. Disparition massive des services publics et des systèmes de protections sociales, explosion de phénomènes de violences et du crime organisé, main mise de pans entiers de territoires par les mafias aux profits des trafics les plus divers, mouvements de populations pour essayer d'échapper aux désindustrialisations de régions entières... Scénario catastrophe me direz-vous ? Mais souvenons-nous des folles promesses des promoteurs du Traité de Maastricht il y a 20 ans ? Où sont les millions d'emplois, où sont la croissance, la prospérité, le développement et la démocratie ? 

Tout au contraire, à chaque jour qui passe on nous demande de « sauver l'euro ». Le G20 et le sommet de Bruxelles n'ont permis que de gagner quelques jours jusqu'au « mini-sommet » de Strasbourg. Et jusqu’au prochain. A chaque fois, non pas pour s'attaquer à la cause du mal, mais pour créer un univers de coercition, un « espace disciplinaire » pour reprendre l’expression de Jean-Pierre Chevènement. Le tout s’accompagnant d’un discours permanent de culpabilisation, qui doit nous amener à comprendre et à admettre qu'il faudra renoncer à ce qui a fait l'Etat providence. C’est à dire les luttes et le progrès social.

UNE GUERRE DÉTERRITORIALISÉE

Il faudra donc souffrir pour gagner le paradis européen. Avant l'Eden qu'on nous promettait il y a plus de 20 ans, il y a le purgatoire. Estimons-nous heureux d'échapper à l'enfer. Mais nous n’y échapperons pas. On pensait gagner la paix éternelle protégées par les étoiles de la Vierge Marie mais nous risquons fort de n'y récolter que le désastre. Non pas dans notre relation avec l'Allemagne, qui ne tardera pas à être logée à la même enseigne, mais dans ce que nous sommes, dans notre identité politique même.

 Car la guerre est à venir. Elle a déjà commencée. Elle ne se fera pas avec des divisions blindées et des escadrilles de bombardiers ou à coup de missiles. Plus personnes en Europe n'a de vraies capacités militaires, et il y a la bombe atomique. Mais les armes d'aujourd'hui ce sont les marchés financiers, les fonds de pension, « les hedgs funds », les produits dérivés, les paradis fiscaux. La menace est déterritorialisée. La guerre est déterritorialisée, mais ses conséquences ont un impact bien réel sur les hommes et les femmes, leurs conditions de vie et les lieux où ils habitent et travaillent.

 C'est la nouvelle guerre asymétrique. L'alliance de l'actionnariat, avec la notion de retour de taux de profit s'appuyant sur les produits financiers complexes et mathématiques pouvant circuler librement sans contrainte de temps, constitue un véritable système d'arme d'une efficacité redoutable et mortelle. Car il atteint les hommes et les territoires dans ce qu'ils sont au plus profond d'eux-mêmes.

DÉTERMINER L'AVENIR DE NOTRE PAYS

Les marchés financiers, idéologiquement formatés par le néo-libéralisme, doivent détruire ce qui freinent leur libre expansion : les services publics, les solidarités ouvrières et sociales, les systèmes de protections économiques, de santé, de retraite, le droit du travail... Ils doivent, dans la logique impériale qui est désormais la leur, briser les résistances, les structures nationales et démocratiques qui par essence s'opposent à l'empire. Pour ce faire, le contrôle de l'Etat est un enjeu majeur afin qu'il devienne le relais nécessaire de cette transformation.

C'est donc aussi de la nature de l'Etat dont il est question. Quelle est sa légitimité ? Qu'est-ce qu'il incarne ? De qui procède-t-il ? Constatons le fonctionnement quasi incestueux aujourd’hui, tant au niveau sociologique qu’anthropologique, des dirigeants financiers, gouvernementaux, bancaires et des multinationales. Ils passent de la BCE aux agences de notations, des Etats, aux banques, de la Commission européenne au monde des affaires.   

La fusion visible sous nos yeux des grands systèmes de « gouvernance » : Etat, multinationales, systèmes bancaires et financiers, Commission européenne, Banque Centrale Européenne ; est l'une des questions essentielles qui conditionne l'avenir de la démocratie et à coup sûr de la République. Parce qu’elle touche à la question de la souveraineté, donc de la liberté des peuples. La nature de l'Etat est en réalité au cœur de la campagne de 2012. Pour ces raisons, la place et le rôle du peuple dans son acception républicaine et patriotique déterminera l'avenir de notre pays, comme cela a toujours été le cas depuis que la République est la forme moderne de la France et quand celle-ci c'est retrouvée devant le risque de sa propre disparition. Qu'il s'agisse de 14-18 où de 39-45.

UN PROGRAMME DE SALUT PUBLIC

Briser la souveraineté des peuples est donc à la fois une conséquence mais aussi une obligation politique pour asseoir la domination des nouvelles structures du capital. Ce rapport de force est évident. Il obligera la gauche si elle veut parvenir au pouvoir en mai 2012, à des réformes et à un courage considérables concernant le fonctionnement de ce qui restera de l'Union européenne, de la Banque Centrale Européenne, de la monnaie unique, dont l'avenir, en l'état est condamné. Elle doit s'y préparer, et il n'y aura pas d'état de grâce.

Il obligera, le moment venu,  des hommes et des femmes à se dresser devant l'implacable dictature impériale des marchés. Pour cela il faudra faire confiance à notre pays et à son peuple. Il faudra faire confiance aux peuples d'Europe. Car ce n'est qu'à partir d'eux que nous trouverons le ressort pour faire levier, pour « faire bouger les lignes ». Dans de telles conditions, un gouvernement de rassemblement national qui devra mettre en œuvre un programme de Salut Public, n'est pas à exclure. 
Sans cela, la catastrophe est aujourd'hui inévitable. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, tant que nous ne toucherons pas à celles-ci nous mettrons des rustines sur une jambe de bois. L'heure sera aux hommes et aux femmes de caractères. A celles et de ceux qui avaient compris et analysés le système qui se mettait en place. Maastricht, Acte Unique, Pacte de Stabilité, Traité Constitutionnel Européen, Traité de Lisbonne... L'heure sera aussi à celui qui sera en capacité de rassembler le pays pour faire face au choc qui va venir. Avec Jean-Pierre Chevènement serons-nous entendus ? 

Claude Nicolet est Premier secrétaire de la fédération du Nord du Mouvement Républicain et Citoyen, Secrétaire national du MRC, Conseiller régional du Nord Pas de Calais ( www.claudenicolet.fr )

Retrouvez l'article sur le site de Marianne2

http://www.marianne2.fr/L-empire-des-marches-contre-la-nation-la-democratie-et-la-Republique_a213046.html