Claude NICOLET

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Christian Hutin1Article de la Voix du Nord du 30 septembre 2015

Nous avons joint ce mardi Christian Hutin, député du Nord du Mouvement républicain et citoyen et maire de Saint-Pol-sur-Mer, alors qu'il se trouvait sur le territoire national… au lycée français de Damas. Une visite éclair, apte à engendrer la polémique, réalisée avec deux députés du groupe d'amitié France-Syrie…

– Pourquoi avez-vous répondu à l'invitation de députés syriens ?
« Il s'agit d'une visite humanitaire, d'évaluation, d'un voyage privé payé de mes propres deniers. J'ai été très libre. Je m'attendais à une visite plus serrée. À l'Assemblée nationale, nous avons eu droit à un débat sans vote et à la parole du Premier ministre. Un débat sans vote, est une chose, un débat sans voir, c'est pire que tout. Je n'étais jamais venu en Syrie ; je souhaitais découvrir un pays qui souffre d'une problématique politique très complexe. »

– Qu'avez-vous vu ?
« J'ai visité Homs ce matin (hier). C'est dramatique. Ça ressemble à Dunkerque en 1945, du moins aux images que j'en ai vues. Une ville à terre, des gens sous les bombes, qui souffrent de l'embargo, avec des problèmes d'alimentation et de soins. La ministre de la Santé m'a dit que 40 % des hôpitaux ont été détruits par Daech. »

– Le régime de Bachar al-Assad est tout aussi coupable dans ce conflit !
« Je ne suis pas naïf, pas un enfant de chœur. Je sais que je vais en prendre plein la tête en rentrant. Mais la vérité aujourd'hui, c'est qu'il n'y a pas de solution sans le régime en place. Vous savez, en Afrique, la France travaille avec d'autres chefs d'État assez peu recommandables… »

– La France ne l'envisage pas comme une part de la solution…
« Les Syriens adorent la France mais se demandent quelle est notre politique. Ils se marrent de nos frappes aériennes. Notre diplomatie perd de la puissance dans le monde arabe en ignorant l'importance de la Russie, de l'Iran qui revient dans le concert des nations. On néglige le côté laïc de ce pays où églises et mosquées coexistent. Cette chose-là est en train d'être détruite par l'instrumentalisation de la religion. Si on veut sortir de la crise, cela passe par une réconciliation. »

– Comme Poutine, vous dites que seule une grande alliance peut vaincre Daech ?
« Ici, on me dit que ce n'est pas aux Occidentaux ou aux États de la région de choisir le futur chef. Mais ils me disent : « Aidez-nous à nous débarrasser de cette barbarie. » Il faut parfois savoir être pragmatique. En 40, Roosevelt n'a pas hésité à conclure une alliance objective avec Staline. Comme de Gaulle rencontra Staline pour faire reconnaître la France libre. Sans l'État syrien, il est impossible d'éradiquer Daech. Éliminons d'abord la barbarie, après, on verra si la suite se fait avec ou sans Bachar. »