Association de 1901, la Nation citoyenne se fixe comme objectif d’explorer et de favoriser le dialogue, l’échange, le rassemblement des citoyennes et des citoyens, d’intellectuels, des organisations politiques, des clubs de réflexion et de pensées pour lesquels la question républicaine est désormais centrale.
Quelles perspectives pour notre pays ? Comment participer à la construction d’une alternative politique qui puisse répondre aux défis auxquels le pays est confronté et faire en sorte que la France ne sorte pas de l’histoire ?
Pour replacer au cœur de notre action pour faire vivre la République, il faut remettre l’Etat au service de la nation et restaurer la souveraineté populaire. L’attente est grande est nous faisons l’analyse que les idées que nous développons sont désormais majoritaire dans le pays. Il faut offrir un débouché politique à cette majorité d’idées qui soit conforme à notre idéal républicain.
Le défi est certes immense mais nous considérons que nous entrons dans une nouvelle période historique. Que ce soit l’ampleur de la crise sanitaire, économique et sociale, les attaques terroristes - provenant d’une idéologie mortifère dont l’objectif est de nous abattre et de renverser l’ordre des choses, le désenchantement de la construction européenne, le dégagisme politique - illustrant la perte de sens et de repère, le besoin de sécurité qu’expriment nos concitoyens ou leur désir de reprendre en main notre destin commun… Tout cela nous indique clairement l’ampleur des bouleversements qui sont en cours.
Trop longtemps, sous couvert de progrès et au nom de la « tolérance et du vivre ensemble » - qui n’étaient en fait que des renoncements à l’universalisme républicain, fût promu le « droit à la différence » qui n’a abouti qu’au désir exacerbé d’organiser notre société selon la différence des droits, parfaitement compatible avec la société néolibérale.
Il y a peu de temps encore, la Nation, la souveraineté, l’indépendance, les frontières étaient considérées comme autant de vieilleries à mettre au musée. Ce n’est plus le cas. Ce n’est pas tant du « retour du refoulé » dont il est question que de la vérification « qu’on ne fait de politique qu’à partir des réalités ». La question nationale est actuellement au cœur des préoccupations de nos concitoyens. Nous ne pouvons la séparer de celle de la citoyenneté puisque nous sommes des républicains dont l’héritage politique et philosophique vient du siècle des Lumières.
Avec quelques amis, nous prenons la responsabilité d'intervenir et de participer au débat qui s'ouvre pour l'élection présidentielle. Nous voulons faire entendre la voix des républicains. Nous considérons en effet que ces questions sont déterminantes et qu’elles doivent maintenant peser de tout leur poids dans ce débat qui va conditionner notre avenir à la fois en tant que nation et comme citoyens de ce pays.
Certains d'entre-nous sont issus parfois d'un long compagnonnage avec Jean-Pierre Chevènement. Cette parole, cette histoire, cet héritage sont, selon nous, indispensables pour comprendre la période et participer à l'élaboration d'une nouvelle offre politique. Nous ne prétendons être, ni les détenteurs, ni les gardiens de sa parole. Cependant, nous constatons que nombreux sont aujourd’hui celles et ceux qui considèrent son apport à la vie politique française comme considérable et ses analyses d’une véritable modernité. La République reste une exigence.
De ce fait, nous nous adressons à toutes celles et ceux, républicains sincères qui souhaitent, au-delà de clivages souvent dépassés, discuter, débattre, proposer, construire un avenir pour le pays.
Comment, dans ces conditions, ne pas nous tourner vers les héritiers sincères du gaullisme dont l’héritage continue de fructifier bien au-delà d’appareils politiques qui s’en réclament ? Comment ne pas accepter que lorsque l’essentiel est en jeu, beaucoup nous rassemble plus qu’il ne nous sépare ? La question nationale, celle de l’indépendance de la France, de notre souveraineté… Comment envisager une société de progrès social sans, dans le même temps, s’appuyer sur une base industrielle puissante capable de nous projeter dans l’avenir et de peser dans le concert des nations ?
Comment également ne pas nous abreuver et nourrir notre pensée à la source féconde et puissante de Jean Jaurès ? Lui qui a articulé la question sociale avec la question nationale. Lui pour qui la liberté et la souveraineté étaient inséparables. Lui pour qui la fraternité était la lumière qui devait éclairer le chemin de la condition humaine. Lui pour qui la République devait permettre l’émancipation de l’Homme, par la démocratie qu’il ne séparait pas du socialisme. Lui pour qui la patrie était le plus court chemin vers l’internationalisme et la fraternité entre les peuples.
Nous ne sommes pas un parti politique mais une association. Nous souhaitons ainsi rassembler largement parce que nous voulons que se rencontrent et débattent, « les républicains des deux rives », de Jaurès à de Gaulle, qui ont eu à cœur de faire le lien entre la question sociale et la question nationale, le lien entre la souveraineté nationale et la citoyenneté ou le lien entre la liberté et la laïcité.
La misère explose dans notre pays, 300 000 SDF ne connaissent que la rue, 5,8 millions de nos concitoyens sont au chômage, 10 millions de Français sont considérés comme pauvres, voilà des chiffres (fondation abbé Pierre) qui n’ont jamais été atteints en France. Dans le même temps, la richesse ne cesse de se concentrer entre les mains de quelques-uns et la France a été le deuxième pays au monde où la fortune des milliardaires a le plus progressé en un an.
La tâche est importante. Nous considérons qu’il est de notre responsabilité historique de tout mettre en œuvre afin de travailler à l'élaboration d'une perspective politique au pays qui traverse une crise politique, économique, sociale, culturelle et identitaire majeure, dont les causes sont anciennes et fracturent notre imaginaire. Pour utiliser une image et au risque de prendre un raccourci audacieux, il nous faut participer, avec d’autres, à la création d’un espace de réflexion politique qui sera aux républicains d’aujourd’hui et de demain, ce que fût le CERES pour la gauche il y a cinquante ans. C’est-à-dire le lieu d’élaboration d’une offre politique républicaine s’affranchissant des dogmes qui enferment notre pays dans l’impuissance et participent du « malheur français », ou de la mise à l’écart de notre histoire et de notre destin.
Nous allons au-delà du clivage gauche/droite (qui existe encore bien évidemment), mais qui, à lui seul, ne permet plus de comprendre le monde et les phénomènes qui sont à l’œuvre. Quarante ans de globalisation financière, de numérisation de l'économie et des rapports sociaux, de construction européenne néolibérale - tout cela traversé par la fin de la guerre froide et la disparition de l'URSS - ont bouleversé la donne.
Désormais, l’idée même de République devient une ligne de partage, mettant en cause l’essentiel.
L’électorat populaire a très majoritairement abandonné les formations censées le représenter. Il s’est tourné depuis bien longtemps soit vers l’abstention, soit vers ce que d’aucuns nomment les « populistes ». Nous pouvons avoir légitimement présent à l’esprit l’idée que nous sommes à « front renversé ». Ce sont Donald Trump et Marine le Pen qui remettent en cause le libre-échange, c’est Boris Johnson qui fait le Brexit et prend médiatiquement la défense de l’ouvrier britannique. Les formations « progressistes » surnagent comme elles peuvent dans des sociétés fracturées, où les crises culturelles et identitaires sur fond de conflit ethnoreligieux s’exacerbent.
Les replis identitaires sur une multitude de « communautés », l'importation à grande échelle des névroses états-uniennes, la poigne de fer de l'économie de la finance, exigent que nous pensions un nouveau modèle et que nous refusions les termes que veulent notamment nous imposer les « entrepreneurs identitaires » selon le concept de Laurent Bouvet. C’est la nature même de notre parcours dans l’histoire des Hommes et des nations qui est en jeu. Une certaine idée de notre pays, voire de notre civilisation, à moins d’accepter définitivement « d’être devenus américains. »
Le bout de ce chemin pour notre pays n’est rien d’autre que l’effacement.
La Nation citoyenne souhaite donc faire œuvre utile en voulant participer de ce grand débat qui s’ouvre. En faisant se parler celles et ceux qui, en réalité, dessinent par leurs parcours un nouveau chemin depuis plus de trente ans.
Des combats de Maastricht jusqu’au référendum du 29 mai 2005 en passant par la présidentielle de 2002 jusqu’à celle de 2017 - qui ont dissipé l’écran de fumée entretenu par des formations politiques engluées dans leurs choix européens, il nous faut désormais travailler à l’élaboration d’un « changement de paradigme » pour reprendre l’expression d’Hubert Védrine.
En conséquence, nous estimons que si « la bataille culturelle » peut sembler gagnée, elle ne l’est pas en termes de projets, de perspectives d’avenir et d’offre politique. Il nous revient donc, d’y travailler si nous pensons que cette analyse est juste.
C’est l’objectif de cette association.